Le pétrole et l’eau, au cœur de la recherche actuelle d’Ursula Biemann, ont une résonance particulière au Canada.
Deep Weather (2013) juxtapose les sables bitumineux de l’Alberta et les berges du Bangladesh. La voix off, qui murmure sur le ton de la confidence, nous fait immédiatement sentir complices de ce qui se déploie sous nos yeux.
Bien que les actions humaines aient un effet capital sur l’avenir de la Terre en cette ère de l’Anthropocène, nous connaissons et contrôlons peu les interactions mondiales fluides et invisibles. Les grandes mines à ciel ouvert et le traitement à la vapeur des sables et des roches argileuses du nord de l’Alberta ont drastiquement abaissé le débit de l’eau de la rivière Athabasca vers l’océan Arctique; les bassins à résidus miniers ont remplacé les forêts boréales, altérant l’écologie d’une manière encore difficile à mesurer et à prévoir. Le sol est réduit au statut de marchandise par les compagnies multinationales qui se préoccupent peu du futur bien-être de la planète.
Au Bangladesh, l’élévation des niveaux de mer – résultat de la fonte des glaces himalayennes – revendiquent les terres habitables et affectent d’importantes populations n’ayant nulle part où aller. Les communautés réagissent en renforçant avec des sacs de sable des berges boueuses, en inventant une agriculture flottante et des écoles adaptables : ce sont là des efforts artisanaux à échelle héroïque contre des obstacles pratiquement insurmontables.
Les deux sections de Deep Weather révèlent des liens sous-jacents entre ces deux emplacements très éloignés l’un de l’autre, nous sommant de reconnaître notre place dans l’écologie planétaire et de réfléchir à l’avenir que nous sommes en train de construire aujourd’hui par nos actions.
—PG